Bulletin 2012 Histoire - Récits - Mémoire

Du cours complémentaire au collège d’enseignement secondaire à Croix de Vie- Saint Gilles

ETE 1940
Entraînées par la débâcle de la retraite, des familles ardennaises s’échouèrent à Croix de Vie et à Saint Gilles. Ayant laissé leurs biens derrière elles, la priorité était de trouver à se loger, le plus souvent chez l’habitant, avec l’aide des édiles locaux. Leur nouvelle vie, péniblement organisée et la rentrée approchant, la priorité des parents fut de scolariser leurs enfants. Si les plus jeunes pouvaient être accueillis, sans trop de problème, dans les classes primaires des deux communes, il n’en allait pas de même pour leurs aînés. Les garçons et les filles n’avaient d’autres choix que l’internat dans des écoles primaires supérieures non mixtes aux Sables d’Olonne, à Chantonnay, à Fontenay, à Luçon et à la Roche sur Yon qui comptait de plus un lycée pour les seuls garçons et un collège pour les filles. C’est alors que Mademoiselle Fath, directrice du cours complémentaire de Château-Régnault (Ardennes) et deux enseignantes toutes trois également réfugiées décidèrent de reconstituer leur cours complémentaire d’origine, d’autant qu’elles avaient retrouvé quelques uns de leurs élèves. Ce cours complémentaire improvisé de trois classes mixtes, reçut prés de 70 élèves essentiellement des enfants réfugiés des Ardennes. Les enseignantes se répartirent les programmes de la sixième à la troisième. Ce cours complémentaire fonctionna d’abord dans l’actuelle cantine de l’école Bocquier puis très vite trouva à se loger à Croix de Vie, dans les locaux de l’ancienne «auberge de jeunesse», rue de la Broche. Ces institutrices offraient du même coup aux jeunes de Saint Gilles et de Croix de Vie la chance de pouvoir suivre, sur place, un enseignement primaire supérieur capable d’élargir leur avenir. Trois garçons du pays furent accueillis quelques semaines dans ces classes : Eugène Bourdet de Saint Gilles qui se souvient de ses camarades, M. Boisliveau et Rogatien Mornet de l’Aiguillon sur Vie.
Ce cours complémentaire ne fut jamais reconnu par l’inspection d’académie et ferma au départ des réfugiés et des enseignantes retournant dans les Ardennes. Les parents des deux communes multiplièrent alors les démarches auprès de l’académie et de la mairie de Croix de Vie afin d’obtenir l’ouverture d’un cours complémentaire dans leur commune.

1941
Monsieur Baguet,inspecteur primaire, accepta finalement de nommer deux enseignants réfugiés,
Madame Girard (venue des Ardennes) et Monsieur Devin (originaire de l’Aisne). C’était habile. Alors que la création d’un cours complémentaire lui aurait été refusée par l’académie, il lui était possible d’autoriser l’enseignement du programme en obtenant de leurs académies d’origines le détachement de ces enseignants. Il espérait pouvoir, ultérieurement, faire entériner cette création. Pour sa part, le docteur Potel, maire de Croix de Vie, mit des locaux à disposition, rue De Gaulle (actuel magasin de chaussures «Arcazy»). Entre-temps, l’effectif des élèves était passé à 40. Pendant toute l’année 1941, le cours complémentaire resta mixte et fonctionna sans directeur et sans existence officielle.

1943
Le plan de Monsieur Baguet a fonctionné : le cours complémentaire mixte fut officialisé, des locaux, plus fonctionnels, furent promis, un directeur fut nommé en la personne de Monsieur Maratier, alors directeur de l’école primaire de Croix de Vie. Il réunit autour de lui une équipe d’enseignants dont les anciens élèves gardent encore un souvenir chaleureux : Messieurs Simon, Jutard, Devin et madame Girard assuraient les enseignements. Le succès du cours complémentaire mixte de Croix de Vie se doubla d’une extraordinaire activité sportive, véritable exutoire pour les jeunes et les adultes avides d’échapper, si peu que cela soit, aux vicissitudes imposées par l’occupation. C’est à cette époque que «Océan Sport» mit en place une importante section d’athlétisme. Les entraînements et les compétitions suscitèrent la ferveur des supporters enthousiasmés par les exploits de ces sportifs au stade de la Chapelle équipé d’un « parcours Hébert » selon les directives de Vichy. Des équipements sportifs apparurent : des bassins de viviers (pour crustacés) furent aménagés en piscine quai Gorin. Il s’agissait d’apprendre à nager aux enfants alors que l’accès de la plage de Saint Gilles en zone militaire allemande était interdit et que la plage de Croix de Vie, bien que autorisée, était hérissée de chevaux de frises. Dans le même temps l’enseignement catholique créa, pour les garçons, le cours complémentaire des Epinettes, futur collège de Saint Gilles et pour les filles, l’école Jeanne d’Arc. Enfin, plus tard et brièvement, un lycée technique fut ouvert rue Torterue. Les métiers de la pêche suscitèrent l’ouverture d’une école maritime rue de la Broche à Croix de Vie dans les locaux de l’ancienne Auberge de Jeunesse, vestige du Front Populaire. Cette école sera transférée avenue de la plage. C’est également à cette époque que fut ouverte la Maison Familiale Rurale à la Bouchère.

1944-1945
C’est alors que Saint Gilles ne voulant pas être en reste, en sa qualité de chef lieu de canton, obtint de l’inspection d’académie un cours complémentaire. Il était politiquement difficile de supprimer le cours complémentaire mixte de Croix de Vie Il fut donc décidé de maintenir les deux établissements au prix de la mixité. Un cours complémentaire fut réservé aux filles à St Gilles. Sa direction fut confiée à Madame Métais également chargée d’enseignements et dont l’équipe pédagogique était composée de Mademoiselle P. Baudry (future Madame Bourdet) et de Mademoiselle Simon. Le nouvel établissement occupa la maison Merveau, à l’angle de l’actuel quai Garcie Ferrande et de la rue Gautté. Cette maison de maître avait de l’allure. Le charme de ces locaux, par ailleurs peu fonctionnels, fit néanmoins dire à l’inspecteur général que le cadre « était digne de Colette ». Le cours complémentaire de Croix de Vie, désormais réservé aux garçons, garda son directeur, Monsieur Maratier, mais perdit sur le champ plus de la moitié de ses effectifs qui purent être reconstitués dès la rentrée suivante. L’enjeu était de taille car de l’effectif des élèves dépendait celui de l’équipe d’enseignants. C’est ainsi que Monsieur Jutard vint renforcer l’équipe d’enseignement en qualité de professeur de mathématiques.

1947-1949
Les deux établissements bénéficièrent de l’appui du docteur Potel, maire de Croix de Vie et de celui de M. Bocquier, ancien directeur de l’école Normale, tous deux s’attachant à ce que les deux établissements bénéficient de bâtiments corrects et soient bien équipés. Pour leur part les enseignants des deux cours complémentaires mirent un point d’honneur à permettre, à leurs élèves de réussir. 85% des élèves présentés par le cours complémentaire des garçons furent reçus au brevet. Dans la même période 14 élèves réussirent le concours d’entrée à l’Ecole Normale dont l’un d’eux fut reçu premier au concours général de mathématiques. L’obtention du baccalauréat, moins briguée, était aussi plus rare car elle exigeait le départ en internat soit au lycée de la Roche sur Yon, soit à Nantes. Le succès au concours d’entrée à l’école Normale était une spécialité reconnue du cours complémentaire des filles. Réussir le brevet élémentaire était une victoire qui permit à des jeunes filles de Saint Gilles et de Croix de Vie de se présenter avec succès aux concours proposés par l’administration, les postes, le Trésor Public et les banques… C’était pour elles la garantie de pouvoir se donner un avenir et une autonomie économique. Ainsi se voyait récompensé le travail acharné, proche de l’abnégation, que les enseignants assumaient depuis 1945. Madame P. Bourdet se souvient de semaines qui enchaînaient 30 heures de cours hebdomadaires, suivies des corrections et de la préparation des cours suivants.

1962
Le cours complémentaire de filles, devenu collège d’enseignement général (CEG) s’installa dans l’école neuve «Edmond Bocquier» avec pour directrice Mademoiselle Hélène Porchier

1968
Après maintes réformes, le collège unique d’enseignement secondaire (CES) Garcie Ferrande, dirigé par Monsieur Rousseau et son adjointe H. Porchier, reprit le flambeau et regroupa filles et garçons. Les cours furent assurés par une équipe élargie regroupant les enseignants des cours complémentaires et du secondaire. Depuis lors, les réformes se sont succédées. Reste intacte l’ambition des enseignants de donner à leurs élèves toutes les chances d’avoir un avenir selon leurs aspirations.

Avec le concours de R.Berthomé et D. Rivalin, anciennes élèves.

Sources : documents aimablement prêtés
et commentés par Monsieur et Madame Bourdet,
enseignants à Saint Gilles- Croix de Vie

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *