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Bulletin 2015 Dossiers d'actualités

Rencontre avec un pêcheur de civelles

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La Flotille des civeliers (photo V.I.E.)

La Flotille des civeliers
(photo V.I.E.)

Il n’a pas le moral le pibaleur ou civelier (pêcheur de pibale ou civelle). Découragé, il envisage de vendre son bateau avec lequel il espérait gagner sa vie. C’est une petite unité de moins de 9 mètres conçue pour, l’hiver, pêcher la civelle dans la Vie, et, aux beaux jours, poser casiers, lignes et filets du printemps à l’automne. Pour la pêche à la civelle, le bateau est équipé de deux trémies (pibalots), grandes épuisettes rectangulaires installées de  chaque côté du bateau, traînées dans l’eau et remontées au bout de quelques minutes. S’il décide d’arrêter, il espère bénéficier d’une indemnisation pour l’arrêt d’activité de pêche (aide financière à la destruction du bateau). Que le temps est loin (20
ans) quand ils étaient une trentaine de pêcheurs. Maintenant 15 pêcheurs  résistent encore aux menaces pesant sur leur activité, devenue très peu rentable. En octobre 2014 la flottille des civeliers a perdu 4 unités.
Le problème est que, malgré l’augmentation de la population de civelles constatée récemment dans l’estuaire de la Vie, les quotas* limitent la production à 40 kg de civelles par bateau destinées à la consommation, principalement le marché espagnol, soit un quota global de 42,5 tonnes pour les pêcheurs français, dont 17 tonnes pour les ports vendéens et de la Loire (1). En décembre 2013, la période de pêche a duré moins de 15 jours, au moment où la température de l’eau et les masses d’eau douce consécutives aux pluies sont propices à la remontée des civelles qui profitent de l’ouverture des vannes du barrage des Vallées pour accéder aux marais (limite de salure des eaux). Quand les vannes sont fermées, c’est par la passe à anguilles que les civelles grimpent vers l’amont. Plusieurs dizaines de kilos de civelles sont de temps en temps constatées en haut de la passe.
La pêche a pu continuer en janvier 2014 pour le repeuplement,  mais le mareyeur n’a pas réussi à bien commercialiser  la production, la concurrence est vive.
Des braconniers plus ou moins organisés brouillent le marché en réalisant des ventes au noir.
A ce jour le civelier ne sait quel parti prendre. Doit-il, l’angoisse au ventre, se séparer de son bateau et abandonner la pêche à la civelle ? Peut-il raisonnablement espérer une révision du quota, couplée à une autorisation d’exporter sa pêche en Asie? Son projet est plutôt de se lancer dans la pêche à la crevette.

Denis Draoulec

  1. La civelle est vendue  vivante et est exportée en grande partie pour les élevages d’anguilles du monde  entier. Elle vaut 5 à 6 centimes d’euro pièce environ. Un kilo de civelles représente en moyenne 3 000 individus.
  2. La pêche à la civelle  a fait autrefois  figure de pêche miraculeuse  tant les prix  étaient  élevés; ce n’est plus le cas aujourd’hui et les professionnels français demandent  une  réouverture, même partielle des marchés asiatiques qui dopaient les ventes. Les marins étant assujettis à un quota de tonnage de pêche, il  est incompréhensible que l’exportation  vers les pays asiatiques soit fermée car cela n’entraînerait aucun préjudice sur le stock de civelles,  si ce n’est une volonté politique  de faire tomber les prix afin que les marins pêcheurs aient plus de mal à vivre de ce métier et que cela entraîne  dans le  temps une diminution de leurs effectifs ?
  3. Rappelons que la pêche de loisir de la civelle est interdite. La pêche professionnelle est autorisée du 1 décembre au 15 avril. En fait dès janvier 2014 la pêche  à la civelle a été fermée prématurément (arrêté préfectoral) du fait des quotas atteints. Elle a été prolongée dans l’estuaire de la Vie jusqu’en avril 2014 pour alimenter le marché du repeuplement.
  4. Le quota était de 34 tonnes pour 2012-2013. Après  avis du comité scientifique en juillet 2013, puis du comité socio-économique,  le 2 septembre 2013, le Ministère de l’Écologie et du Développe- ment durable a fixé à 42,5 tonnes le quota national  de captures pour la saison  2013-2014. Un quota revu à la hausse  en raison non seulement des remontées importantes de civelles en 2012 et 2013 mais aussi de la baisse conjointe du nombre de pêcheurs professionnels. 17 tonnes de civelles étaient destinées à la consommation, 25,5 tonnes au repeuplement.
  5. Pour la saison de pêche 2014-2015, il est  envisagé de fixer le quota  de pêche d’anguilles de moins de 12 cm destinées à la consommation  à 30 tonnes, soit une augmentation de 13 tonnes par rapport au quota destiné à la consommation fixé lors de la campagne 2013-2014  (17 tonnes). Cette augmentation est proposée au regard de l’avis du comité scientifique qui confirme l’augmentation du recrutement en civelles et l’atteinte des objectifs de réduction de la mortalité  par pêche fixés par le plan de gestion de manière à ce qu’il représente 60 % du quota total, conformément aux dispositions du règlement «anguilles». Afin de protéger  le stock  il est envisagé un quota de 30 tonnes qui correspond à l’avis du comité socio-économique.

* les quotas de capture de civelles instaurés en France des 2009, visent à reconstituer la population d’anguilles en application du règlement européen (2007). La population des anguilles autrefois très abondante s’effondre en France depuis les années 1980 et figure dans la liste rouge des espèces menacées. Plusieurs mesures de sauvegarde, luttant contre les principales menaces  (les pollutions des eaux, les barrages, la surpêche, les pertes d’habitat), contribuent au repeuplement progressif de l’espèce.

Bulletin 2015 Dossiers de V.I.E.

Le dragage des ports de Saint Gilles Croix de Vie, quelles alternatives ?

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L’activité de pêche et de plaisance conduit la collectivité (délégation Semvie) à draguer des sédiments encombrant le chenal de l’estuaire jusqu’à
une épaisseur de un mètre de boue, avec pour objectif de placer la cote minimum à – 0,50 m sur le bassin de plaisance. Le statut de port du réseau «passeport escale» oblige à entretenir la cote de – 3 m sur le ponton visiteurs (n° 8) et la souille du ponton passagers de l’Ile d’Yeu. Les opérations de dragage sont menées par la Semvie pour le port de plaisance (coût d’environ 450 000 €) et pour le compte de la CCI* au titre du port de pêche et de commerce pour un montant de 185 000 €. La Semvie utilise son propre matériel (drague aspiratrice et conduite) qui est aussi périodiquement déplacé à Granville pour le dragage de ce port. La campagne actuelle (port de plaisance) a débuté en novembre 2014 (installation de la drague et des conduites réalisée fi n octobre en mortes eaux) pour se terminer en mars 2015. Environ 82 000 m3 de sédiments (58 000 m3 de sédiments vaseux et 24 000 m3 de sable) ont été extraits du chenal et des 3 ports de Saint Gilles Croix de Vie, pêche, plaisance et vieux port-embarcadère, durant la campagne de dragage d’octobre 2013 à avril 2014.

Drague aspirante en action dans le port de plaisance de Saint Gilles (photo V.I.E.)

Drague aspirante en action dans le port de plaisance de Saint Gilles
(photo V.I.E.)

L’extraction des sédiments vaseux est réalisée par une drague aspirante construite en Vendée dont le principe est de remettre la vase en suspension à l’aide d’un rotor et d’aspirer le mélange ainsi formé (environ 80 % d’eau) qui sera acheminé par les conduites à travers la dune de la Garenne vers la zone de rejet à environ 300 m du pied de dune dans le déferlement des vagues chargé de dissiper la turbidité.
L’opération est soumise aux prescriptions de l’autorisation préfectorale réactualisée, arrêté préfectoral du 27 novembre 2013, composé de 13 articles de prescriptions, notamment en matière de surveillance de la qualité du gisement de coquillages (analyse bactériologique) et de la qualité des sédiments (prélèvements et analyses faunistiques et physicochimique des échantillons) selon des seuils définis par le groupe de travail GEODE* pendant toute la durée de l’opération de dragage et les 2 semaines suivantes. Les opérations de dragage sont justifiées par la nécessité économique de navigabilité dans le chenal de l’estuaire et dans les bassins portuaires.

Le rejet sur le littoral suscite des inquiétudes.
Le rejet, devant la plage, de sédiments vaseux résultant du dragage, suscite interrogations et inquiétudes tant de la part des promeneurs que des pratiquants des sports nautiques, sur l’aspect rebutant du déversement des boues provoquant un panache de turbidité plus ou moins étendu, les éventuelles conséquences sur la bathymétrie de la plage, la composition et la stabilité de son sable, les impacts possibles sur la biodiversité de l’estran. Ce sont surtout les risques sanitaires engendrés par les différents contaminants contenus dans les sédiments dragués qui ont motivé des signalements de la part de responsables de clubs de sports nautiques et de leurs adhérents. Ces signalements vont du simple mal de ventre jusqu’aux cas de gastro-entérite et irritations de peau. Le Surfing Club a procédé à ses propres contrôles de la qualité des eaux de baignade pendant et en dehors de la période de dragage complétant ainsi les contrôles effectués par les autres organismes qui comme l’ARS (Agence régionale de santé des Pays de la Loire) a déjà signalé des contaminations bactériologiques des tellines. Les conséquences sanitaires liées au rejet des sédiments vaseux sur la plage doivent être objectivées en tenant compte des autres sources de pollution apportées par le jusant dans l’estuaire et dans les eaux de baignade et par les conséquences de fortes pluviométries qui entraînent des surverses des réseaux d’assainissement et le lessivage sur les sites d’élevage (ruissellement des terres amendées au fumier, débordements de lisier…) situés en amont du port de Saint Gilles Croix de Vie. Le procédé de dragage actuel peut-il être amélioré ? Doit-on étudier d’autres solutions ? Y-a-t-il des alternatives à la solution de dragage et rejet devant la plage ? Y-a-t-il des solutions limitant les apports des alluvions, leur sédimentation, leur pollution ? Les solutions alternatives peuvent être classées en deux catégories : les curatives et les préventives. Les solutions alternatives dites «curatives » font référence à des procédés d’extraction des sédiments déjà formés :

Point de rejet des sédiments dragués dans le port de St Gilles Croix De Vie  (photo V.I.E.)

Point de rejet des sédiments dragués dans
le port de St Gilles Croix De Vie
(photo V.I.E.)

Extraction pour clapage (ou immersion) en mer :
les sédiments sont dragués à l’aide d’une pelle mécanique adaptée, qui dépose le contenu dans une barge ; bateau et ponton sont déplacés pour la manoeuvre d’extraction. La barge remplie est envoyée en pleine mer sur un site dédié pour larguer sa cargaison de sédiments extraits. L’expérience montre que le dépôt de sédiments, qui généralement se dispersent peu et s’accumulent, provoque l’asphyxie de l’écosystème sous-marin qui devient un désert de vie. C’est une solution contraignante, coûteuse (de l’ordre de 15 €/m3, trois fois plus onéreuse que la solution actuelle), vivement combattue à la fois par les pêcheurs et les défenseurs de l’environnement, institutionnels ou associatifs. Cette solution n’apparaît plus comme une alternative raisonnable.

Extraction pour traitement à terre :
Les sédiments sont extraits mécaniquement ou aspirés, puis décantés pour être transportés vers un lieu de stockage, ce qui implique des coûts de traitement parfois considérables, notamment pour les dessaler et les décontaminer avant réutilisation éventuelle. Les coûts de dragage et dépôt à terre des sédiments avoisinent les 100 €/m3, soit environ 20 fois plus cher que la solution actuelle. Seule une valorisation (cas des sables) permet de réduire ces coûts auxquels s’ajoutent les coûts écologiques (émission de carbone) et les risques accidentels liés au transport par camions en zone urbaine (en première approximation de l’ordre de 6 000 camions de 15 tonnes par an seraient nécessaires à chaque campagne de dragage de notre port).

Les solutions alternatives dites «préventives ».

Ces procédés d’ingénierie écologique s’inscrivent dans une logique d’optimisation des effets naturels du courant ou de réduction des vases, si possible avant sédimentation.
Voici quelques procédés :

Mise en suspension des vases et entraînement par le jusant :
ce procédé consiste à remettre les sédiments en suspension (avec la technique du «rotodévaseur») de manière à ce que le jusant évacue vers l’océan la turbidité créée en mélange avec la turbidité naturelle témoignant du transit habituel des alluvions. L’impact sur l’écosystème est limité si les volumes mis en jeux correspondent à un entretien régulier (petits volumes à évacuer mais de manière fréquente). Ce procédé expérimenté depuis longtemps par les ostréiculteurs charentais est, par exemple, utilisé pour le dragage d’ouvrages portuaires de l’estuaire de la Vilaine.

Renforcement de l’effet chasse d’eau :
il s’agit d’accroître l’effet d’entraînement par le jusant des alluvions et sédiments frais en aménageant le chenal et le lit principal pour renforcer «l’effet chasse d’eau». Les barrages des Vallées et du Jaunay ont réduit le volume du balancement des marées, diminuant l’effet de chasse. L’estuaire de la Vie présente un profil très coudé qui ralentit le débit du jusant tout en protégeant les rives des vagues déjà fortement atténuées; mais le chenal relativement resserré est propice à l’entraînement de la plus grande partie des alluvions comme le révèle le panache de turbidité devant l’estuaire. Par contre en amont du pont de la Concorde jusqu’au barrage des Vallées, le cours de la Vie présente des méandres que renforcent les bancs de sable et les vasières en formation et, à l’opposé, l’érosion des rives. Est-il possible d’envisager un léger profilage du lit principal tout en gardant l’énorme réservoir que constituent les marais bordant la Vie pour alimenter cet effet de chasse ?

Procédé de drainage des vases :
c’est une solution de prévention de l’envasement des ports selon un dispositif modulable de drainage, de pompage et de remise en circulation des sédiments en suspension vers le milieu naturel avant que les alluvions ne se sédimentent. Une infrastructure de drains posés au fond des bassins capte les particules sédimentaires avant qu’elles ne s’accumulent et se complexifient avec les éventuels polluants présents dans les eaux portuaires et les rejettent vers le chenal au moment optimal du jusant. Ce procédé basé sur un concept d’ingénierie écologique respecte les cycles de circulation du milieu naturel. Citons le procédé breveté Sediflow mis au point par l’Ecole Centrale de Nantes et testé dans le port de Binic (Côtes d’Armor).

Procédé de réduction des vases par traitement biologique :
des activateurs biologiques ou des bactéries sont capables de réduire la vase par minéralisation des éléments organiques, jusqu’à faire baisser de 50 % le volume de sédiments, proportion équivalente pour les hydrocarbures résiduels. L’ensemencement des surfaces du bassin portuaire peut se faire soit sur un support (zéolitique), essais au port de la Flotte en Charente Maritime, au port d’Antibes…, soit par insufflation de bactéries et d’air dans la vase (l’activité bactérienne est facilitée par la bonne oxygénation de la vase), méthode expérimentée par les ports d’Arcachon et de Toulon. On le voit, les solutions alternatives préventives existent. Les divers procédés sont brevetés et ont fait l’objet de tests concluants et d’analyses d’impact (des eaux, des sédiments, des organismes vivants), même si leur mise en oeuvre ne résout pas complètement les problèmes de l’envasement.

Limitation des apports d’alluvions et de réduction des déchets et autres polluants :
Et si la cible principale serait d’agir en amont pour limiter les apports d’alluvions des cours d’eau et réduire voire éliminer déchets et polluants ? De quelle profondeur avons-nous besoin ? Pour quel tirant d’eau ? Pour quelle activité portuaire ? Dans quelle partie du port ? At-on besoin de draguer tous les bassins et pontons à flots ? L’échouage de bateaux dont les sorties se comptent sur les doigts de la main, amarrés à certains pontons (c’est le cas d’une partie des pontons 11 et 12) n’est-il pas préférable économiquement ? Autant de questions qu’il y a lieu de poser. En effet, quelques soient les solutions, la réduction des quantités de sédiments à extraire ou à traiter (par moyens biologiques par exemple) sera toujours un atout dans le processus de dragage et l’élimination des déchets et polluants, une mesure indispensable pour l’environnement, la qualité de l’eau, la santé. Explorons ces deux objectifs d’amélioration. Quelles sont les mesures permettant d’alléger l’apport d’alluvions dans l’estuaire de la Vie ? L’apport d’alluvion s’accroît notamment lors des périodes de pluie au cours desquelles s’intensifient et s’accélèrent les ruissellements et l’érosion des berges des marais, prairies et espaces cultivés du bassin-versant Vie-Jaunay.

Parmi les mesures permettant de limiter cet apport d’alluvions et donc le volume de sédiments s’accumulant dans les ports de Saint Gilles Croix de Vie:

  • renforcement des berges en aval du barrage des Vallées, soumises à une forte érosion notamment la rive droite,
  • protection des berges des marais avec végétaux adaptés (roseaux…),
  • protection des berges des zones cultivées et des prairies par des aménagements tels que fossés et haies,
  • protection des berges en faisant obstacle au cheminement et à l’abreuvage direct des animaux,
  • limitation des labours des parcelles en pente trop proches des cours d’eau. Parmi les pistes de réduction d’apport d’alluvions, il faudrait pouvoir limiter les apports exceptionnels (curage des barrages, épandage de fumier et de lisier, …) et le labourage, lors des périodes de fortes précipitation et de faibles coefficients de marée où l’effet de chasse est le moins efficace.

Quelles sont les mesures contribuant à réduire les déchets et autres polluants recueillis dans le périmètre de l’estuaire de la Vie?

Concernant la pollution qui accompagne les alluvions et se complexifie par la sédimentation, des marges d’amélioration permettraient de réduire déchets et autres pollutions :

En amont de la ville et des ports :

  • éviter le déversement accidentel (débordement) de lisier ou les pratiques agricoles non respectueuses de la règlementation (épandage mal pratiqué…),
  • améliorer l’assainissement des communes en amont,
  • maîtriser la densité des élevages industriels qui concentrent différentes pollutions y compris les pollutions dites fantômes (perturbateurs endocriniens et autres produits médicamenteux),
  • maîtriser l’activité des installations de méthanisation qui concentrent des déchets divers dont la qualité n’est pas toujours contrôlable,

Dans les zones urbaines et portuaires:

  • améliorer l’assainissement pour éviter surverses des réseaux et saturation des stations d’épuration lors des séquences de forte pluviométrie,
  • améliorer le traitement des eaux recueillies sur la zone de carénage du port de plaisance (projet d’amélioration en coordination avec l’Agence de l’Eau),
  • améliorer la gestion des déchets et du traitement des eaux de surface du parking du port de pêche,
  • récupérer les petits déchets aspirés et rejetés avec les sédiments que l’on retrouve au premier jusant sur la partie supérieure de l’estran, l’idéal étant le ramassage manuel des déchets non naturels.

Par ailleurs l’amélioration de la surveillance des eaux et sédiments, et de l’information donnée est indispensable :

  • communiquer le résultat des contrôles dans le cadre des prescriptions de l’arrêté d’autorisation (opportunité des prélèvements et analyses des tellines et des sédiments confiés au laboratoire Asconit agréé par le Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable),
  • renforcer le suivi par le SAGE de la qualité des eaux du bassin versant Vie- Jaunay,
  • informer davantage sur les travaux de dragage, panneau d’informations sur le remblai prévu par la Semvie et meilleures visibilité des informations ARS : les pêcheurs à pieds non locaux ne voient pas toujours les informations de l’ARS ou de la Mairie.

Conclusion : Conjointement à une réflexion sur l’évolution du mode de retrait des sédiments des ports (avec leur pollution), c’est en amont du dragage que des marges de progrès sont à réaliser : réduction de la masse des sédiments qui est acheminée dans l’estuaire, réduction voire élimination, en amont et dans la ville et les ports, des sources de pollution de l’estuaire. L’évolution de la réglementation laisse présager un durcissement des conditions d’autorisation des opérations de dragage et de rejet sur l’estran. Aux responsables d’anticiper et de mettre les acteurs en capacité de maîtriser les changements pour les enjeux de la cité portuaire et balnéaire.

Denis Draoulec.

*GEODE : Groupe d’Etudes et d’Observation du Dragage et l’Environnement.
*Au moment de la rédaction de cet article, V.I.E. a appris que la Communauté de Communes a proposé à ses partenaires de se substituer à la CCI pour la gestion du port de pêche et du port de commerce.

 

 

Bulletin 2014 Histoire - récit - mémoire

Quand le Hope était encore un projet

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La pinasse, «La Paulette», s’engage doucement dans le chenal, entraînée par son moteur, le 14-16 baudouin, juste assez puissant pour lui permettre d’entrer et de sortir du port. Le jour se lève à peine. Pour une fois les douaniers allemands avaient été à l’heure. Ce n’était pas comme à la marée précédente où il avait fallu rester tapis dans l’ombre à attendre leur arrivée. Pas moyen d’embarquer sans faire signer le carnet et ensuite accoster sur leur ponton, mouiller dans la Vie, et y subir la fouille. Aujourd’hui, Israël Chevrier est seul à bord, ses casiers, entassés à l’avant, prêts à être mouillés sur le plateau rocheux de «l’encornet», en face des dunes du Jaunay. Il connait les fonds comme sa poche entre l’île d’Yeu, Saint Jean de Monts et Brétignolles, à force de les sonder du bout de ses plombs suiffés. Il est fier de la réputation de l’équipage qu’il forme avec ses deux gars, André et Maurice. Il ne suffit pas de connaître les bons coins de pêche, il faut aussi savoir manoeuvrer les voiles, sitôt sorti du port, pour économiser le gasoil. Et une fois arrivé sur place, parvenir, sous voile, à relever les casiers en se plaçant sous le vent de la bouée qui signale l’emplacement, saisir la hampe du pavillon et haler sur l’orin sans frotter la coque au risque de faire fuir un homard perché sur le dessus comme c’était arrivé la semaine dernière. Il n’était pas rare d’en trouver cinq à gigoter dans la nasse. Dommage que les estivants ne viennent plus les déguster. Sale époque ! Lui et ses fils n’ont pas leurs pareils pour la pêche aux crustacés. Haler cinquante kilos à bout de bras demande de la force, du savoir-faire et de la finesse comme de se servir des mouvements de la houle et haler à son rythme quitte à faire danser le bateau quand la mer est d’huile. Pour l’heure, Israël s’apprête à dépasser la jetée de Boisvinet et le nid de mitrailleuses qui est enfoui à l’épaulement de la corniche. La rumeur raconte qu’il y a un souterrain reliant le bunker à la villa en retrait occupée par des officiers allemands. Il n’ignore pas qu’une quarantaine de nids de mitrailleuses et une quinzaine de blockhaus ont été enfouis dans les sables de la Garenne et tout le long de la corniche jusqu’à Sion laissant juste apparaître la gueule des canons, braqués sur le large et sur l’entrée du port. Israël se prend à envier la vue sur la mer qui s’offre aux soldats allemands en faction dans le blockhaus incrusté dans le haut de dune au-dessus de «la guillotine». La grisaille du petit matin se défait lentement tandis qu’à l’horizon, un trait de lumière sépare le ciel bleuissant de la mer encore couleur de pierre. Enfin, la mer libre ! Israël hisse la voile et pousse la barre à tribord afin que le vent tende la toile. Il a devant lui une demi-heure qu’il entend mettre à profit pour ruminer son projet. C’est un gars de Sion qui lui avait confié cette pinasse au moment de son enrôlement sous les drapeaux. Plutôt que de la laisser croupir le long d’un quai, il avait préféré la confier à un marin qui savait naviguer. Avec Israël, capitaine du bateau de sauvetage de Croix de Vie, il pouvait être tranquille. La mère du patron de «la Paulette» lui avait annoncé quinze jours plus tôt, rayonnante, que son gars allait être libéré du camp où il végétait comme prisonnier de guerre depuis deux ans. Il s’était fait prendre dès le début des hostilités comme tant d’autres. A son départ, il ne pensait pas partir pour si longtemps ! Israël est heureux de lui remettre en main la barre de cette pinasse qu’il bichonne avec soin sachant le prix de cette confiance. Maintenant il lui faut un bateau, seul moyen de subsistance de la famille. Il a en tête de reprendre les plans d’un ancien caseyeur sur lequel il a longtemps navigué et qu’il regrette encore. Ce serait un voilier, avec juste la place du 14-16 baudoin qu’il y replacerait. Les temps l’imposaient et ça ne lui déplait pas, tant qu’il pourra naviguer avec ses gars. C’est le moment d’utiliser ses 15 000 francs d’économies. Olympe, son épouse est d’accord.

Israël Chevrier et ses fils, en pêche

Israël Chevrier et ses fils, en pêche

Le bateau se dessine dans sa tête. Il le veut assez large pour avoir leurs aises, à trois, avec les casiers, et faire les manoeuvres. Bien dans les 3-4 mètres. Du coup il devrait avoir au moins 14 mètres de long hors tout, sous voile et 8,50 m à la flottaison. Il en confierait la construction à Didier Thomazeau dont le chantier, rue Pierre Martin, est voisin de son habitation. Il lui fait une totale confiance pour tirer les plans d’un bon bateau, seulement à partir d’un croquis et de ses indications. Pas un bateau ne sortait de son chantier sans avoir été d’abord précédé de longues discussions avec le futur propriétaire. Tous les deux savaient bien qu’un bateau est une affaire de coeur et de tête avant d’être celle des mains.
La légendaire débrouillardise du maître charpentier plait à Israël. La pénurie organisée par l’occupant rend tout tellement difficile que faire affaire avec Thomazeau est gage de succès. Par exemple, sa réserve de chêne faite à temps, une garantie pour un bateau solide. Le gréement lui donne plus de crainte. D’ici qu’il faille aller chercher le mât en forêt de Saint Hilaire ! Le bois n’aurait pas le temps de sécher. Il faudra naviguer avec prudence. S’agirait pas de casser en mer. Israël chasse ses inquiétudes en réfléchissant aux voiles. Vu le poids du bateau qui fera sans doute dans les 7-8 tonnes il demandera à Morineau, le voilier de la Grande Rue de lui couper une voile aurique, un foc, une trinquette et une voile de pic. Israël aime ces moments de réflexion en mer. Il lui semble avoir les idées plus claires qu’à terre où tout se complique. Il a bon espoir de mener à bien son projet malgré les difficultés de l’époque. Il peut compter sur les siens et l’expérience de ceux à qui il va confier une bonne part de son avenir. L’espoir ! Celui qui fait se lever le matin et réaliser l’improbable si on sait s’appuyer sur les bonnes épaules. Soudain, Israël agite joyeusement sa casquette au nez de la mouette qui lui tourne autour. Il sait comment il appellera son bateau à la barbe de l’occupant en lançant un clin d’oeil aux alliés par-delà les mers !

Le Hope sera mis à l’eau, quai Gorin, sans tambour ni trompette un jour de l’été 1943. Auparavant, il avait fallu que Maurice, en vélo aille jusqu’à la kommandantur des Sables d’Olonne pour se faire délivrer le carnet sans lequel aucun navire n’aurait été autorisé à sortir du port.

Le Hope encore caseyeur

Le Hope encore caseyeur

Le Hope sera barré par Israël Chevrier et ses fils pendant une dizaine d’années puis par un autre marin de Saint Gilles Croix de Vie qui en fera l’acquisition. Le Hope eut ensuite à naviguer hors des eaux de la Vendée pendant plusieurs années. Il fallut la ténacité de Jean Yves Robriquet et de quelques amis qui créèrent une association pour le ramener à Saint Gilles Croix de Vie et le remettre en état. En 1987 et 1988, une troupe scout de Niort, logée à la ferme de la Bégaudière s’attela à rénover sa charpente et son gréement. Après quoi, la troupe scout pu le faire naviguer pendant une semaine. Ce fut ensuite au tour du centre de formation professionnelle « AFPA », également installé à la Bégaudière de démonter et de remettre son moteur en état. Le Hope ne pouvait mieux témoigner de la valeur éducative de toute transmission de patrimoine. A compter du 5 décembre 1988, l’association, faute de moyen, céda le Hope à la ville de Saint Gilles Croix de Vie qui en a confié la gestion à l’association Suroît.

Depuis, il navigue 80 jours par an grâce à la disponibilité compétente des bénévoles de l’association qui se consacrent attentivement au dernier voilier de pêche de Vendée, seul inscrit au patrimoine maritime. Bientôt le Hope déploiera, de nouveau, ses voiles rousses, si familières, après une cure de rajeunissement de près de deux ans.

Michelle Boulègue
Article réalisé à partir des souvenirs de Maurice Chevrier et l’aide des écrits de André Droy.
Illustrations : 2 photos prêtées par la famille Chevrier.