Se promener le long des rues bordées de hauts murs de pierres qui jalonnent ses quartiers historiques est l’un des plaisirs simples que nous offre Saint Gilles Croix de Vie. Ces murs en disent long sur l’art des maçons de faire les agencements les plus improbables de pierres taillées, de galets, de dalles de schiste vert du Fenouiller, de tuilots et de débris de briques sans oublier quelques culots de bouteilles. Un examen attentif de ces murs révèle, plus encore, la cartographie des circuits maritimes du port, du temps où le commerce maritime européen était, au XVIIème siècle, l’activité portuaire dominante par rapport à la pêche y compris la pêche à la morue sur le site de Terre neuve. Depuis l’antiquité, le cabotage tout au long des côtes de France, de l’Angleterre et des pays nordiques a fait transiter, par le port, vers ces régions, des cargaisons de vins, céréales, sel, en échange de bois, d’étain, de fer et autres. Faiblement quillés afin de pouvoir remonter le plus loin possible à l’intérieur des terres, les bateaux devaient être lestés pour mieux affronter la houle en haute mer. Ces pierres que les équipages ramassaient sur les rivages sont les ultimes témoins de ces longs périples, dont Garcie Ferrande a dressé les routes dans son «Grand Routier». François 1er en a immédiatement compris la portée stratégique alors qu’il cherchait à contrer la domination des mers par l’Espagne et l’Angleterre. Ces murs de pierres sont donc des pages à ciel ouvert de l’histoire du port. A ce titre nous approuvons l’alerte donnée par le CPNS lorsque l’un de ces murs, porteur, qui plus est, d’un graffiti représentant l’un de ces bateaux, s’est fait mettre à mal, rue Abel Pipaud, lors de travaux autorisés par
Monsieur l’Architecte des bâtiments de France, ZPPAUP oblige. Cette alerte a sans doute inspiré la protection de ce graffiti par l’office du tourisme.*
Pour V.I.E il faut tirer les leçons de cette destruction :
- Les murs en pierres de lest sont des biens privés qui ont acquis au fil du temps un intérêt collectif car ils contribuent à la personnalité de notre cadre de vie.
- Ce patrimoine commun est mal protégé par la ZPPAUP actuelle.
- Une protection renforcée ne devrait pas, cependant constituer une contrainte sans contrepartie pour les
Que faire ?
V.I.E propose une approche qualitative de la protection des murs en pierres de lest au-delà des dispositions actuelles de la ZPPAUP. Sa révision prévue fi n 2009, nous en offre l’opportunité. En effet, il s’agit de distinguer les murs en pierres de lest, des murs de pierres ordinaires qui ne manquent pas. Protéger l’ensemble des murs de pierres pourrait entraîner des contraintes excédant largement l’intérêt quand, seuls, quelques témoignages sont intéressants. V.I.E a donc entrepris, avec le concours de ses adhérents, de dresser une carte des murs de pierres sur Saint Gilles Croix de Vie et d’analyser les caractéristiques minérales des pierres qui les composent afin d’identifier les pans les plus représentatifs. Avec toutes les bonnes volontés qui pourraient se sentir concernées par la préservation des murs en pierre de lest, nous prévoyons de monter un dossier. Notre ambition est de travailler en concertation avec la mairie dans le cadre de l’élaboration du prochain règlement de la ZPPAUP avec pour but :
- Élaborer un article du règlement de la future ZPPAUP précisant l’objet et les modalités de la protection des murs en pierres de lest identifiés comme tels.
- Mobiliser la Préfecture de Vendée afin que la D.R.A.C soit amenée à ce prononcer sur l’intérêt collectif de ces murs et, sous couvert de l’avis de Monsieur l’Architecte des Bâtiments de France, intégrer définitivement cet article dans le règlement de la ZPPAUP.
- Solliciter le Conseil Général afin que cette protection s’inscrive dans sa politique d’aide à la pierre et de protection du patrimoine à l’échelle départemental.
Pour V.I.E, il importe de protéger les murs en pierres de lest, témoins de l’histoire commerciale du port et exposés à l’usure, aux malfaçons et à la négligence. Cette protection ne peut incomber, sans contrepartie, aux seuls propriétaires de ces murs dès lors qu’ils font partie du patrimoine commun.
Denis Draoulec