C’est le nom de l’ouvrage maritime qui protège la baie d’Adon depuis l’an 16O1, à l’initiative de Marie de Beaucaire. Elle répondait enfin aux voeux des marins du port qui n’en pouvaient plus de devoir accoster sous les coups de boutoir du jusant. Fine manoeuvrière et près de ses intérêts, elle avait adressé une requête à Henri IV dès 1596 pour obtenir des subsides permettant de financer le coût des travaux estimé à 12 000 écus de l’époque. Henri IV, sachant pertinemment que le trafic du port fournissait des recettes appréciables à Marie de Beaucaire, lui répondit aimablement le 5 avril 1598 qu’elle était autorisée à financer elle-même les travaux dont elle aurait à se rembourser en prélevant une redevance de 7 sols 6 deniers par tonneau de marchandise entrant et sortant, assortie d’une exemption pour le sel destiné aux greniers du roi. Le 1er marché est passé le 22 novembre 1599. L’ouvrage a été réalisé en deux tranches : la construction d’un quai en croissant de 18 brasses de long (32,40 m) et de 8 de large (14,80 m) et un éperon occidental mis en construction le 1er mars 1601 pour un coût de 2 300 écus. Une fosse creusée le long du quai devait permettre l’accostage de bateaux de plus fort tonnage et améliorer d’autant le rendement de l’ancien port d’échouage.
Le chantier dura 3 ans et s’avéra difficile d’emblée. Pour sa part Marie de Beaucaire n’a pas hésité à rogner sur le coût des matériaux et leur transport en recyclant les ruines de son vieux château de Riez. Cependant il faut attendre le siècle suivant pour que le môle donne des signes de fatigue. En 1714, le musoir s’est effondré. Il fut alors décidé d’en profiter pour le prolonger à 50m de long afin d’améliorer la protection du port.
Des plans datés de 1724 confirment que le môle mesurait déjà 45 brasses de long (80 m), sa longueur actuelle, soit 50 m de plus qu’en 1690. On peut donc être fondé de penser que, entre ces deux dates, ces travaux ont bien été entrepris à l’initiative du comte de Pontchartrain, ministre de la marine. En 1724, l’ingénieur Tigné fut chargé de renforcer l’épaisseur du môle et d’en arrondir l’extrémité afin d’augmenter l’effet de chasse, le tout pour un coût estimé de près de 40 000 livres tournois. Des travaux d’entretien se succédèrent en 1746 et 1788. La désignation «d’éperon de Pontchartrain» apparaît enfin sur une réédition datée de 1788 du plan «Bégon» de 1690 assortie d’une référence au ministre de la marine de Pontchartrain par Chevalier Isle, confirmant notre hypothèse. Depuis lors, le môle est baptisé officiellement « éperon Pontchartrain ».
A partir du XIXème siècle, l’éperon de Pontchartrain n’a plus la vedette. Les travaux vont se poursuivre sur l’autre rive et deux nouveaux phares amélioreront l’accès du port. Toutefois, Marcel Baudouin, cité par B de Maisonneuve, fait état de chantiers de 1803 à 1805 car «le môle éprouva de graves avaries». En effet, les fondations ne soutenaient plus l’ouvrage tant les pilotis en bois, supports du musoir, étaient rongés par les tarets. De 1840 à 1855 on édifia un phare qui fonctionna jusqu’en 1880 afin de signaler l’entrée du port. La suppression du sommet sur lequel on entretenait des brasiers de signalisation a donné sa silhouette à l’actuelle «tour Joséphine» restaurée par le Conseil Général en 2001 et agrémentée par la création d’un jardin ouvert au public à l’initiative de la mairie en 2003.
Michelle Boulègue
Sources :
– «Les premières installations portuaires de Saint Gilles Croix de Vie et les ingénieurs du Roi» par Thérèse Kleindienst.
Recherches vendéennes – N°5, 1998, pages 129 à166 .
– «Saint Gilles Croix de Vie, d’après les écrits de Marcel Baudouin» par B de Maisonneuve. A.R.H.I.M.S.