L’écoulement pluvial est l’un des plus silencieux et des plus vieux problèmes d’urbanisme. Ne pas s’en préoccuper peut porter atteinte aux biens fonciers privés et collectifs et provoquer des inondations. C’est aussi l’un des principaux motifs de conflit de voisinage. C’est pourquoi cette question relève, à la fois, du code civil, du
code de l’urbanisme et du code de l’environnement.
En premier lieu, il revient aux propriétaires fonciers de satisfaire aux servitudes d’égout de toit et aux servitudes naturelles d’écoulement. A ce titre, l’article 681 du code civil stipule que les eaux pluviales en provenance des toits ne doivent pas s’écou- ler directement sur un terrain voisin mais sur celui du
propriétaire ou sur la voie publique. Lorsque la toiture se situe en limite de propriété, cela définit une servitude d’égout de toit.
La servitude naturelle d’écoulement oblige le propriétaire d’un terrain en contre bas de recevoir les eaux d’écoulement des terrains situés plus haut. Sur ce point le code civil précise que :
- le propriétaire d’un terrain supérieur ne peut aggraver la servitude naturelle d’écoulement en réalisant notamment des travaux modifiant la circulation et la vitesse d’écoulement (article 640),
- le propriétaire du terrain inférieur ne peut faire obstacle à l’écoulement en réalisant une digue, un mur ou un renvoi des eaux vers le terrain supérieur,
- en cas d’aggravation de la servitude naturelle d’écoulement, à l’initiative d’un propriétaire de terrain supérieur, celui-ci est redevable d’une indemnité au propriétaire du terrain inférieur (article 641 du code civil).
Dans le cas d’un permis de construire ou d’un permis d’aménager, des prescriptions relatives à la gestion des eaux pluviales peuvent s’appliquer en référence à des documents et règlements d’urbanisme tels qu’établis par le PLU ou le zonage pluvial qui ont à préciser les principes d’infiltration et de stockage préalable des eaux pluviales, la limitation du débit autorisé au réseau de collecte en cas de raccordement, les choix de revêtement, le coefficient de pleine terre… Le projet architectural doit préciser «les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics, les équipements privés prévus notamment pour l’alimentation en eau et l’assainissement (article R 431-9 du code de l’urbanisme)».
En cas d’un permis d’aménager, il n’y a pas de pièce réglementaire à laquellerattacher explicitement la question del’écoulement des eaux pluviales (article R 441-1 à 4 du code de l’urbanisme). Une autorisation d’urbanisme valide la conformité du projet au regard des règles d’urbanisme. Elle ne démontre pas le respect des règles de droit privé. Ce qui signifie qu’un permis de construire ne dédouane pas son bénéficiaire de ses obligations au regard du code civil. Il lui revient de s’assurer que ses obligations au titre de l’écoulement des eaux pluviales et des écoulements naturels sont respectées par son projet.
Les projets de lotissements, de zones d’activités relèvent quant à eux d’une procédure de déclaration ou de demande d’autorisation au titre du code de l’environnement (rubrique 22.1.5.0– rejets d’eaux pluviales).
Au fil des acquisitions, il s’oublie progressivement qu’un fossé séparait autrefois deux parcelles. La rareté du foncier en zone balnéaire favorise des constructions mitoyennes, à cheval sur un fossé busé et oublié. Le désir d’optimiser son bien peut inciter à gagner sur ces espaces sans assurer suffisamment le drainage, indispensable à l’assainissement des sols. C’est ignorer, plus ou moins délibérément que l’eau suit, obstinément, les mouvements du terrain et que si les fossés ne sont pas curés, que les buses sont encombrées ou écrasées, les constructions subissent des remontées d’humidité voire des inondations. Depuis quelques mois le service d’urbanisme de la commune note attentivement ces problèmes, et se rend sur place, à la demande de propriétaires. Une mission de conciliation est déjà intervenue pour aider les propriétaires à régler à l’amiable les tensions que suscite une gestion négligente de l’écoulement des eaux pluviales.
Michelle Boulègue