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Bulletin 2019 Environnement Histoire Récits Mémoire

IL Y A LES VIVANTS, IL Y A LES MORTS, IL Y A CEUX QUI VONT EN MER

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Cette citation de Platon, au IVème siècle av. J.-C., rappelle avec force que la mer reste toujours un espace ténébreux. Les hommes et les femmes qui s’engagent sur ce territoire de forces réunies ou divergentes attendent de la société une solidarité certaine.

Le geste généreux du sauvetage en mer remonte à des millénaires. Les premières traces écrites de sauvetage nous viennent du droit romain qui en fait une obligation. Plus tard, c’est le texte juridique de 1166 : les Rôles d’Oléron, imprimé en 1502 dans le Routier de la Mer de Pierre Garcie dit Ferrande, né à Saint-Gilles-sur-Vie en 1441, qui rappelle les règles fondamentales toujours en cours.

La Société Centrale de Sauvetage en Mer (S.N.S.M.) est née en 1967, grâce aux efforts conjugués de la Société Centrale de Sauvetage des Naufragés (1825) et des Hospitaliers Sauveteurs Bretons (1873). La S.N.S.M., uniquement constituée de « canotiers » volontaires et bénévoles, est forte de 219 stations, animées par 4400 Sauveteurs Embarqués bénévoles et 1300 Nageurs Sauveteurs, volontaires l’été pour la sécurité des plages. Par an, 8000 personnes sont secourues ; on déplore 300 à 400 morts par an.

À l’occasion de l’anniversaire de la station de sauvetage de Saint-Gilles-Croix-de-Vie : «130 ans de la Station SNSM de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, 1888 – 2018 », une exposition s’est tenue tout l’été 2018 le long des quais de Port La Vie (SEMVIE), cinq conférences et un livret anniversaire ont permis aux habitants et estivants de notre région de mieux connaître ceux et celles qui maintiennent cette œuvre sociale, menée par Michel Fillon, président de la station de Saint-Gilles-Croix-de-Vie.

Quoi de plus significatif que de rappeler quatre actions emblématiques qui ont marqué cette période contemporaine.

Le 28 mai 1985 à 11h30, alors que la mer est peu agitée par un vent de sud-ouest à ouest, deux chalutiers de Croix-de-Vie pêchent en tandem : l’ « ALNILAM » et l’ « ODYSSÉE ». Subitement le câble traversier qui relie les 2 bâtiments se raidit après avoir accroché un rocher ou une épave. Le choc est très violent, l’ « ODYSSÉE » résiste bien, mais l’« ALNILAM »  chavire avec ses 3 hommes d’équipage. Les matelots ont eu le temps de sauter à l’eau et sont secourus par l’ODYSSÉE, mais le patron du chalutier est resté bloqué dans la passerelle.

L’alerte est déclenchée par le CROSS (Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage à Etel pour l’Atlantique ouest), cette alerte est déclenchée à 11h30 pour les embarcations de sauvetage de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, « Patron Aimé Baud » et celle de l’Île d’Yeu : « Patron Noé Devaud ».


27 canotiers et membres du Comité SNSM, prêts à partir en mer avec la vedette de sauvetage Présidente Louise Le Louarn, SNS 154

L’hélicoptère de la Protection Civile arrive aussi sur les lieux avec des plongeurs sous-marins ; d’autres ont pris place sur le canot Patron Noé Devaud. Tout sera tenté pour libérer le patron pris dans la passerelle, mais en vain. L’ « ALNILAM » flotte un long moment renversé, la quille hors de l’eau, puis coule par 26 mètres de fond. Les plongeurs ont continué inlassablement leurs tentatives pour pénétrer à l’intérieur du bateau ; le mazout qui s’échappait des cuves et les émanations d’acide des batteries renversées freinaient beaucoup leurs efforts. Vers 15 heures, ils réussirent à remonter le corps inanimé du patron qui fut embarqué à bord de la vedette Patron Aimé Baud et ramené à Saint-Gilles-Croix-de-Vie. Sur la vedette SNS 120 de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, avec le patron Gilbert Héraud, les canotiers qui ont pris part à la recherche, sont Michel Fillon, Bernard Gaborieau, Yvon Caillaud, Patrick Barreau, Philippe Lelièvre, Jean-Michel Péault, Patrick Nayl.

Voici une autre et très différente intervention. Le jeudi 20 mai 1976, à 3h10, le canot de sauvetage, « Patron Noé Devaud » de l’Île d’Yeu, quitte Port-Joinville, ayant à son bord le docteur Delacroix et une jeune femme de 26 ans, dont l’accouchement est proche et l’état critique. Le patron Raymond Taraud décide de diriger le canot sur le port de Saint-Gilles-Croix-de-Vie. La mer est agitée, vent d’ouest avec une force de 14 à 16 nœuds, ce qui rend la traversée pénible. Le concours de la vedette SNS 46 « Vent d’Ouest » de Saint-Gilles-Croix-de-Vie a été demandé au cas où le canot de l’Île d’Yeu ne pourrait pas arriver à bon port du fait de la basse mer. La vedette « Vent d’Ouest » se rend aussitôt au large de Pilours. Mais, sur le canot de l’Île d’Yeu et à vingt minutes de la destination, l’accouchement se précise. Cela n’est pas été sans mal car le docteur n’a pas le pied marin et se trouve en piteux état. Heureusement, le canot se met à l’abri en dedans de Pilours et le mécanicien Joseph Gaillard se métamorphose rapidement en assistant accoucheur. Il contribue pour une large part à la naissance de Cindy à 4h14 du matin. L’étale de basse mer impose à la maman et Cindy d’embarquer sur la vedette de Saint-Gilles-Croix-de-Vie afin de rentrer au port de Croix-de-Vie. Sur la vedette SNS 46 de Saint Gilles-Croix-de-Vie, le patron Roger Driez et les canotiers Michel Fillon et Jules Robriquet. Les troisième et quatrième interventions emblématiques sont racontées par Michelle Boulègue et Christine Ménard un peu plus loin. Par ces quelques mots, nous rappelons la volonté farouche des marins « canotiers » d’être solidaires des fortunes de mer. Cet esprit de solidarité, l’exposition, le livret anniversaire et les différentes manifestations qu’elles ont suscitées en 2018, l’ont rappelé avec force. Alors, que cette belle cité du Pays de Vie vogue sur cette mer qui l’accueille et sache prendre le bon vent qui soutienne la route des sauveteurs.

 Bernard de Maisonneuve bdemaisonneuve@gmail.com

Bulletin 2019

Le Mot des Co-présidents

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V.I.E. a rendez- vous avec vous, de bulletin en bulletin, depuis sa création. L’environnement est à la fois la matière vive et le fil rouge de nos articles, tels que nous offrent notre patrimoine, construit et vivant, notre cadre de vie et les espaces naturels.

L’action emblématique de V.I.E. depuis trois ans déjà est « l’Incroyable Jardin de Monsieur Torterue » parce qu’au service du vivant, il est une œuvre collective, ouverte sur la cité et à laquelle chacun, chacune choisit de s’associer à son rythme, selon ses goûts et ses talents. Parti d’une initiative de quelques-uns, ce jardin s’inscrit progressivement dans la prise en charge des résidents de l’EHPAD, dans la vie du quartier et, accueillant des activités scolaires, se fait lien entre les générations. Nous avons vu ce jardin prendre corps au fil des saisons grâce à l’engagement des bénévoles dans la durée, à la présence assidue et compétente des pilotes du chantier et au soutien conjoint de l’EHPAD et de V.I.E. dans le cadre d’une convention. Tant il est vrai que les projets attirent et mobilisent les énergies s’il leur est offert un cadre de coopération laissant aux initiatives des marges de manœuvre et des moyens et que les bonnes volontés trouvent à s’associer en nombre et durablement. C’est bien là une fragilité de V.I.E. dont l’action dépend essentiellement des forces vives qui s’associent à sa démarche. Nous osons un appel à nous rejoindre.

En phase avec les missions de l’EHPAD et la vie quotidienne du quartier et plus largement de notre cité, ce chantier rencontre, par le jardinage et les principes qui l’inspirent, les envies d’agir collectivement, par plaisir et sans garantie de réussite de ceux qui le cultivent. Ces jardiniers fidèles et assidus témoignent ainsi en toute conscience de leur engagement pour alerter et réduire à leur mesure le mal vivre quotidien et les risques qui menacent tant la planète que le bien commun.

C’est dans le même esprit que nous nous sommes inquiétés du sort de notre ligne ferroviaire menacée par le rapport Spinetta alors qu’elle est gage de notre inscription dans notre terroir et de son développement. Parce que cette ligne est garante de nos mobilités au moindre coût environnemental, nous avons reçu les risques de fermeture tant de cette ligne que des services en gare comme un déni de nos choix de vie au nom de principes comptables imposés de façon unilatérale. Les habitant du Pays-de-Saint-Gilles-Croix-de-Vie ont exceptionnellement échappé à cette entrave à leurs projets de vie personnels et professionnels et à l’asphyxie programmée de notre territoire, à vocation touristique, grâce aux actions conjointes des communes concernées, du Département et de la Région des Pays de la Loire, s’appuyant en cela sur les expertises de la société civile, sociale et économique. Exemple réussi de la capacité d’alternative créatrice que détient «la base » vis-à-vis d’un diktat « d’en haut » lorsqu’elle fait jouer tous les ressorts de la démocratie participative ancrée dans les réalités de terrain. Exemple à méditer tant il souligne la force et la nécessité des complémentarités des compétences détenues collectivement par les citoyens, les élus et les institutions afin de mieux préserver à la fois, nos choix de vie et notre environnement naturel social et économique, actuel et en devenir.

Les Co-présidents

Bulletin 2019 Environnement

Les Hermelles (Sabellaria alveolata)

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Depuis que les humains existent, toutes sortes de constructions sont apparues sur la Terre et ont marqué leur époque : dolmens, pyramides, châteaux-forts, cathédrales, palais et enfin, gratte-ciel. Nous, les Hermelles, nous construisons toujours les mêmes résidences avec « vue sur mer » et même « sous la mer » à marée haute, depuis des millions d’années. Ce sont des pseudo-récifs visibles sur l’estran rocheux qui font penser à d’énormes coussins, éponges ou nids d’abeilles suivant l’imagination de chacun.

En réalité, nous sommes des vers bâtisseurs appartenant aux Annélides Polychètes (vers marins segmentés aux nombreuses soies). Une fois retirés des tubes dans lesquels nous vivons, chacun de nous ressemble à une petite masse allongée, molle et grisâtre d’environ 4 cm. Par contre, si nous sommes photographiés « en studio », dans l’eau, avec une légère coloration et un bon objectif photo, nous pouvons avoir un look plus sympa. De nombreuses soies entourent notre bouche et servent à retenir le plancton nutritif ainsi que les grains de sable.

 Nous y voilà ! Pourquoi des grains de sable ? Pour construire nos habitations qui ne sont pas des châteaux de sable éphémères mais des récifs assez résistants. Nous produisons un mucus qui colle entre eux les grains de sable en formant un tube autour de notre corps. Nos voisins agissant de même, nous nous retrouvons en « appartements parallèles », sachant qu’il n’y a de place que pour un seul animal dans chaque tube. A marée basse, nous sommes bien à l’abri à l’intérieur et à marée haute, nous sortons juste nos soies qui s’agitent à la surface du récif. Nous sommes bien protégés dans nos « chambres marines » et n’avons pas de problèmes de voisinage même si nous formons parfois des colonies de plusieurs milliers d’individus.

Nous jouons un rôle important dans l’équilibre de l’écosystème de l’estran en servant d’abri à des larves d’espèces diverses. Hélas, nous sommes menacés par le piétinement, l’envasement ou le développement des huîtres sauvages dans les secteurs ostréicoles. Pour la reproduction, les mâles et les femelles libèrent leurs gamètes dans la mer où se fera la fécondation. Les œufs puis les larves planctoniques seront disséminés et iront coloniser de nouveaux rochers. Comme quoi, nous pouvons faire « chambre à part » et assurer la survie de notre espèce !