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Bulletin 2015 Dossiers d'actualités

Rencontre avec un pêcheur de civelles

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La Flotille des civeliers (photo V.I.E.)

La Flotille des civeliers
(photo V.I.E.)

Il n’a pas le moral le pibaleur ou civelier (pêcheur de pibale ou civelle). Découragé, il envisage de vendre son bateau avec lequel il espérait gagner sa vie. C’est une petite unité de moins de 9 mètres conçue pour, l’hiver, pêcher la civelle dans la Vie, et, aux beaux jours, poser casiers, lignes et filets du printemps à l’automne. Pour la pêche à la civelle, le bateau est équipé de deux trémies (pibalots), grandes épuisettes rectangulaires installées de  chaque côté du bateau, traînées dans l’eau et remontées au bout de quelques minutes. S’il décide d’arrêter, il espère bénéficier d’une indemnisation pour l’arrêt d’activité de pêche (aide financière à la destruction du bateau). Que le temps est loin (20
ans) quand ils étaient une trentaine de pêcheurs. Maintenant 15 pêcheurs  résistent encore aux menaces pesant sur leur activité, devenue très peu rentable. En octobre 2014 la flottille des civeliers a perdu 4 unités.
Le problème est que, malgré l’augmentation de la population de civelles constatée récemment dans l’estuaire de la Vie, les quotas* limitent la production à 40 kg de civelles par bateau destinées à la consommation, principalement le marché espagnol, soit un quota global de 42,5 tonnes pour les pêcheurs français, dont 17 tonnes pour les ports vendéens et de la Loire (1). En décembre 2013, la période de pêche a duré moins de 15 jours, au moment où la température de l’eau et les masses d’eau douce consécutives aux pluies sont propices à la remontée des civelles qui profitent de l’ouverture des vannes du barrage des Vallées pour accéder aux marais (limite de salure des eaux). Quand les vannes sont fermées, c’est par la passe à anguilles que les civelles grimpent vers l’amont. Plusieurs dizaines de kilos de civelles sont de temps en temps constatées en haut de la passe.
La pêche a pu continuer en janvier 2014 pour le repeuplement,  mais le mareyeur n’a pas réussi à bien commercialiser  la production, la concurrence est vive.
Des braconniers plus ou moins organisés brouillent le marché en réalisant des ventes au noir.
A ce jour le civelier ne sait quel parti prendre. Doit-il, l’angoisse au ventre, se séparer de son bateau et abandonner la pêche à la civelle ? Peut-il raisonnablement espérer une révision du quota, couplée à une autorisation d’exporter sa pêche en Asie? Son projet est plutôt de se lancer dans la pêche à la crevette.

Denis Draoulec

  1. La civelle est vendue  vivante et est exportée en grande partie pour les élevages d’anguilles du monde  entier. Elle vaut 5 à 6 centimes d’euro pièce environ. Un kilo de civelles représente en moyenne 3 000 individus.
  2. La pêche à la civelle  a fait autrefois  figure de pêche miraculeuse  tant les prix  étaient  élevés; ce n’est plus le cas aujourd’hui et les professionnels français demandent  une  réouverture, même partielle des marchés asiatiques qui dopaient les ventes. Les marins étant assujettis à un quota de tonnage de pêche, il  est incompréhensible que l’exportation  vers les pays asiatiques soit fermée car cela n’entraînerait aucun préjudice sur le stock de civelles,  si ce n’est une volonté politique  de faire tomber les prix afin que les marins pêcheurs aient plus de mal à vivre de ce métier et que cela entraîne  dans le  temps une diminution de leurs effectifs ?
  3. Rappelons que la pêche de loisir de la civelle est interdite. La pêche professionnelle est autorisée du 1 décembre au 15 avril. En fait dès janvier 2014 la pêche  à la civelle a été fermée prématurément (arrêté préfectoral) du fait des quotas atteints. Elle a été prolongée dans l’estuaire de la Vie jusqu’en avril 2014 pour alimenter le marché du repeuplement.
  4. Le quota était de 34 tonnes pour 2012-2013. Après  avis du comité scientifique en juillet 2013, puis du comité socio-économique,  le 2 septembre 2013, le Ministère de l’Écologie et du Développe- ment durable a fixé à 42,5 tonnes le quota national  de captures pour la saison  2013-2014. Un quota revu à la hausse  en raison non seulement des remontées importantes de civelles en 2012 et 2013 mais aussi de la baisse conjointe du nombre de pêcheurs professionnels. 17 tonnes de civelles étaient destinées à la consommation, 25,5 tonnes au repeuplement.
  5. Pour la saison de pêche 2014-2015, il est  envisagé de fixer le quota  de pêche d’anguilles de moins de 12 cm destinées à la consommation  à 30 tonnes, soit une augmentation de 13 tonnes par rapport au quota destiné à la consommation fixé lors de la campagne 2013-2014  (17 tonnes). Cette augmentation est proposée au regard de l’avis du comité scientifique qui confirme l’augmentation du recrutement en civelles et l’atteinte des objectifs de réduction de la mortalité  par pêche fixés par le plan de gestion de manière à ce qu’il représente 60 % du quota total, conformément aux dispositions du règlement «anguilles». Afin de protéger  le stock  il est envisagé un quota de 30 tonnes qui correspond à l’avis du comité socio-économique.

* les quotas de capture de civelles instaurés en France des 2009, visent à reconstituer la population d’anguilles en application du règlement européen (2007). La population des anguilles autrefois très abondante s’effondre en France depuis les années 1980 et figure dans la liste rouge des espèces menacées. Plusieurs mesures de sauvegarde, luttant contre les principales menaces  (les pollutions des eaux, les barrages, la surpêche, les pertes d’habitat), contribuent au repeuplement progressif de l’espèce.

Bulletin 2015 Dossiers d'actualités

Ou l’on reparle des goélands argentés

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Goéland argenté

Goéland argenté

La municipalité a décidé de lancer, dès cette année, une campagne «anti-goélands», à la suite de plusieurs attaques de goélands dont se plaignent, de longue date, les habitants.
De quoi s’agit-il ?  L’objectif est  de stabiliser la population de goélands argentés qui semble s’accroître dans la ville et qui incommode les habitants par leurs cris, leurs déjections et leur agressivité, particulièrement  au moment de la reproduction et des soins aux jeunes.
S’agissant d’une espèce protégée, cette action nécessite d’obtenir l’autorisation du Ministère de l’Ecologie. La méthode consiste à repérer les nids et à identifier les œufs (3 espèces de goélands apprécient notre littoral) puis les vernir avec un produit non toxique, non odorant, afin d’imperméabiliser les coquilles et empêcher le développement des embryons.
Il ne faut pas se leurrer : cette campagne d’imperméabilisation des œufs ne peut faire plus que limiter l’extension de cette population qui a progressivement «oublié» son origine marine. Par souci d’efficacité, la Ville va se rapprocher de celles qui travaillent déjà à maîtriser les populations de goélands sur leur périmètre. De même, est envisagée une coopération avec la Ligue de Protection des Oiseaux  (LPO) qui peut fournir des informations et des conseils. Par ailleurs la LPO pourrait effectuer un suivi sur plusieurs années de la faune de notre estuaire au moyen de comptages et de baguages des espèces.

Comment pouvons-nous agir individuellement?

  • en veillant soigneusement à ne pas laisser de déchets alimentaires à l’air libre comme le font déjà les services municipaux de nettoyage en lavant les sols à la fin des marchés et éventuellement en empêchant l’accès à nos toits par des systèmes de piques.
  • en répondant à l’enquête de la Mairie pour la localisation des nids.

Nous pourrons ainsi conserver une population de goélands en équilibre et le fond sonore dont ils nous gratifient, signature de toute ville portuaire.

Janine Bureau.

Vous pouvez consulter l’article que nous avions déjà consacré à ce problème dans le bulletin 2013.

Bulletin 2015 Dossiers d'actualités

Le recul du littoral, une longue histoire

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Le 24 octobre 2014, l’Europe s’est donnée un nouveau «cadre d’action en matière de climat et d’énergie à l’horizon 2030»  qu’il revient au Parlement Européen d’approuver. Ce n’est pas le premier. Celui-ci, ambitieux, témoigne de  la  volonté des  dirigeants européens d’agir collectivement contre le réchauffement de la planète dont sont responsables les gaz à effet de serre (GES) ainsi que le démontrent les travaux du GIEC* depuis 1988. Lui sont imputés les tempêtes de plus en plus violentes, des incendies et des inondations gigantesques, les errements des «Niño» et «Niña», ces courants marins scrutés anxieusement par les riverains du Pacifique, la fonte des calottes glaciaires du Groenland et du Pôle Nord et par voie de conséquence, le rehaussement du niveau des mers. Nos modes de vie sont pointés, trop gourmands en énergies fossiles et responsables des émissions de gaz à effet de serre. Ce nouveau  plan est à saluer. L’objectif est de limiter à 2°C l’augmentation du réchauffement de la planète. Au-delà de cette limite, les experts s’accordent pour dire que le réchauffement  sera incontrôlable avec des conséquences imprévisibles.  Pour la première fois, l’Europe s’engage sur des objectifs chiffrés.

D’ici 2030, l’Europe devra avoir baissé de 40 % à 70 % les émissions de gaz à effet de serre. Dans ce but, la part des énergies renouvelables passera à 27 % du mix énergétique, et, des économies d’énergie de 27 % devront être réalisées. Des contraintes sont prévues en ce qui concerne le premier volet ainsi que des modulations et des compensations financières afin de ne pas pénaliser les économies émergentes. L’enjeu à plus court terme est de réduire, en plus, la dépendance énergétique  de  l’Europe vis-à-vis de ses fournisseurs traditionnels et de renforcer d’autant sa sécurité énergétique.
A notre échelle, nous mesurons tous les jours l’impact du réchauffement climatique. Nous lui devons des hivers moins rigoureux tandis que l’océan grignote nos côtes de marée en marée et reconquiert,  lors de tempêtes exceptionnelles, des terres poldérisées, imprudemment  loties comme en témoigne le drame survenu à la Faute sur Mer, lors de la tempête Xynthia durant la nuit du 27 février 2010. Moins spectaculaire mais tout aussi inquiétant est le constat des apiculteurs qui, le long de notre littoral, depuis trois ans, voient baisser la production de miel de 30 % du fait de printemps froids et pluvieux qui retardent la floraison tandis que des vents froids freinent l’épanouissement des fleurs. Les étés tardifs rattrapent heureusement la situation sans compenser les pertes totalement.
De fait, le trait de côte, actuellement connu, a subi d’autres fluctuations bien plus considérables. Des phénomènes cycliques se déroulant sur des millions d’année ont façonné notre planète. Les géologues ont repérés trois transgression marines successives au cours de l’oligocène, du pliocène et de l’éocène. Il y a -22 000 ans, la calotte glaciaire couvrait l’Angleterre et le sol vendéen ne dégelait pas. A cette époque le littoral était en avant du trait de côte actuel à plus de 100 km et la Manche était un fleuve. Le réchauffement s’est manifesté il y a 12 000 ans, faisant fluctuer le niveau des mers de -110 m à +70 m.
Depuis lors, le recul du littoral se poursuit inexorablement mais de façon chaotique, laissant se former des avancées de terres constituées d’apports éoliens transportés  par des vents dominants, orientées nord/sud. Les cordons de dunes, ainsi formés, bloquèrent l’écoulement  des cours d’eau créant des marais qui, lentement, se sont poldérisés. Ailleurs, 4 500 ans avant notre ère, le site de Maillezais avait les pieds dans l’eau et les hommes de l’époque s’échinaient à  dresser des digues dont il  reste parfois des fondations. La preuve de ce recul nous est donnée lorsque de grandes marées découvrent  des dolmens, enfouis au large, tandis que des traces de labours d’araires remontant à -22 000 ans se sont révélées quand les tempêtes d’hiver ont fait reculer de 20 m les dunes de Brétignolles. On peut difficilement rendre l’activité de nos ancêtres du
néolithique responsable du réchauffement climatique. Par contre, notre responsabilité est avérée. Il est certain que nos progrès technologiques nous affranchissent des contraintes naturelles et  améliorent nos conditions de vie au prix d’une consommation exponentielle d’énergies fossiles produisant des gaz à effet de serre eux même responsables de l’accélération du réchauffement climatique et du rehaussement du niveau des mers. Cette accélération se me- sure, passant d’une estimation de 30 cm par siècle à 80 cm pour la fin du 21ème siècle. Si attendues soient elles, les dispositions adoptées par l’Europe ne peuvent nous faire espérer mieux qu’une stabilisation en l’état.

QUE FAIRE POUR RENFORCER L’IMPACT DE CE PLAN.

Tout  d’abord,  changer nos  modes de vie en mobilisant notre capacité d’adaptation. Mais la  responsabilité individuelle  ne doit pas faire oublier l’impact décisif des incitations économiques et de la spéculation foncière dans l’exposition aux risques climatiques des populations.
Pour leur part les pouvoirs publics et les dirigeants locaux, en première ligne des responsabilités en cas de catastrophe naturelle, s’engagent dans des travaux de restauration et de protection.
Ainsi, à Saint Gilles Croix de Vie, le rehaussement du quai Gorin et du quai des Greniers à +3,80 m NGF, l’entretien des digues et leur restauration sont à l’ordre du jour. Des travaux plus conséquents telles que des écluses sont à l’étude pour protéger les basses terres. Xynthia a révélé l’étiage des risques en affichant une cote NGF à + 3, 85 m quand nos marais sont à + 2 m. La vigilance est de mise ainsi qu’une batterie de plans destinés à aider les populations en cas de submersion marine: plan de sauvegarde communal, plan d’aménagement et de protection contre les inondations, plan ORSEC , prise en  compte systématique des alertes météo afin d’aider les habitants à anticiper les risques météo, mobiliser les secours et préparer les sites d’accueil par avance.
Un responsable résume en trois mots cette mobilisation: observer, ne pas oublier et rester en alerte.
Au-delà, l’enjeu est de parvenir à une régulation économique internationale.

Michelle Boulègue.

Sources : Travaux de la société d’émulation  de la Vendée, BP34, 85001 La Roche sur Yon Cedex.
Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat.